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Les tests multi-pathogènes sont l'avenir du diagnostic

Alors que nous reconstruisons et renforçons les systèmes de santé ravagés par la pandémie, la question que nous devons nous poser n’est plus « est-ce la COVID-19 ? », mais « qu’est-ce que c’est ? »

Au cours des deux dernières années, le monde est devenu obsédé par les tests COVID-19 et ce, à juste titre. Ces diagnostics, qu’il s’agisse d’un test PCR ou d’un test à flux latéral, ont joué un rôle crucial à la fois dans la lutte contre la propagation du virus et dans l’obtention d’un traitement pour les personnes touchées.

Mais alors que nous sortons de la phase critique de la pandémie, les systèmes que nous utilisons pour contrôler la COVID-19 doivent être étendus pour révolutionner la gestion des autres menaces sanitaires mortelles qui pèsent sur la planète, qu’il s’agisse de grandes maladies meurtrières comme la tuberculose ou d’agents pathogènes localisés comme la fièvre de Lassa.
C’est là que les diagnostics multi-pathogènes entrent en jeu. Un patient ne se présente pas à la clinique locale pour faire un test de dépistage de la fièvre de Lassa.

Il se présente parce qu’il ne se sent pas bien, qu’il a de la fièvre et un gros mal de tête, et qu’il veut savoir ce qui ne va pas. Imaginez qu’un seul test puisse être utilisé pour diagnostiquer non seulement la COVID-19, mais aussi de nombreuses autres maladies à tendance épidémique, à partir d’un seul échantillon, dans un établissement de soins primaires. Imaginez que nos systèmes de santé soient structurés autour des patients et non des maladies.

Cela semble futuriste, mais c’est une perspective qui peut être réalisée dans les prochaines années. À l’heure actuelle, les systèmes de dépistage complexes qui permettent d’identifier de multiples maladies dépendent de laboratoires spécialisés et bien dotés en termes de ressources. Toutefois, la pandémie a donné le coup d’envoi à une série de tests moléculaires multi-pathogènes qui pourraient être suffisamment simples pour être utilisés dans les cliniques de soins primaires. Dans le cadre de notre travail sur le dispositif pour accélérer l’accès aux outils de lutte contre la COVID-19 (Accélérateur ACT), FIND a recherché de manière proactive les outils présentant le meilleur potentiel d’utilisation dans les cliniques de soins primaires dans les pays à revenus faibles et intermédiaires.

À la fin de l’année dernière, nous avons annoncé une série d’investissements préliminaires, en espérant que ces outils permettent d’améliorer l’accès aux tests moléculaires essentiels pour de nombreux agents pathogènes. L’objectif est de disposer d’une seule plateforme de diagnostic capable d’identifier la COVID-19 et les maladies telles que le VIH, la tuberculose, la dengue, Ebola, la fièvre de Lassa et d’autres maladies. Cela sera essentiel à la fois pour les soins aux patients et pour le renforcement des systèmes de surveillance des maladies à l’ère à l’issue de la pandémie.

Pour exploiter ce potentiel, les diagnostics doivent rester en tête des priorités en santé mondiale. Toutefois, des signes inquiétants montrent que leur importance est en train d’être négligée. Aujourd’hui, les taux de dépistage de la COVID-19 chutent, de plus de 50 % à l’échelle mondiale depuis décembre 2021, à mesure que les mandats sont levés et que les tests cessent d’être subventionnés. Pourtant, dans les pays à faibles revenus, l’accès au dépistage est, dans le meilleur des cas, inégal.

Il est vrai que les tests ne doivent pas nécessairement atteindre le taux que nous avons connu au plus fort de la pandémie. Cependant, nous devons continuer à donner la priorité aux plus vulnérables, garder un œil sur l’évolution du virus, accroître l’accès à l’infrastructure de test et utiliser ces tests pour identifier les maladies au-delà de la COVID-19.
Nous devons donc maintenir les efforts que nous avons déployés pour établir une infrastructure de test, soutenir la fabrication de tests locaux et développer les capacités de séquençage génomique. Ce n’est pas le moment de perdre de vue notre objectif.

À plus long terme, le maintien et le renforcement de ces programmes nous permettront également d’augmenter rapidement leurs capacités en cas de besoin, non seulement pour la COVID-19, mais aussi pour de nombreuses menaces connues et les nouvelles technologies qui nous permettront de les détecter.

Nous devons également repenser certains de nos systèmes et structures réglementaires, afin qu’ils soient suffisamment flexibles pour soutenir les nouvelles innovations, notamment les tests multi-pathogènes, pour rendre les diagnostics plus abordables et l’approvisionnement plus durable.

La plupart des tests rapides pour la COVID-19 sont encore fabriqués dans un petit nombre de pays, principalement en Corée du Sud et en Chine. Le développement et la mise en œuvre de diagnostics fabriqués localement, y compris les autotests, doivent être facilités et privilégiés, et les développeurs encouragés par des politiques stables qui leur assurent des marchés prévisibles.

Aujourd’hui, les États-Unis, le Belize, l’Allemagne, l’Indonésie et le Sénégal co-organisent un deuxième sommet mondial sur la COVID-19, appelant les gouvernements, les ONG et les entreprises « à prendre de nouveaux engagements et à apporter des solutions pour vacciner le monde, sauver des vies maintenant et assurer une meilleure sécurité sanitaire. »

Alors que l’attention des pays riches retombe en raison de priorités concurrentes – notamment la guerre dévastatrice en Ukraine – cela pourrait être notre dernière occasion de nous appuyer sur la COVID-19 pour améliorer nos systèmes de santé.

Les premiers tests multi-pathogènes pourraient être disponibles dans les cliniques de soins primaires des pays à revenus faibles et intermédiaires dès l’année prochaine ; il s’agit là d’une démonstration du potentiel qui peut être atteint en maintenant, en réaffectant et en développant la capacité de tests de diagnostic qui a été mise en place pour la pandémie de COVID-19.

Bill Rodriguez

Publié en anglais dans « The Telegraph » le 12.05.2022